Scénario : Frontière Asiatique
Préambule
La Corée du Nord effectue un essai nucléaire, déclenche un concert de condamnations internationales et incite l'Onu à lui imposer de nouvelles sanctions somme toute modestes. Washington exprime l'espoir que la Chine finira par ramener au pas cet allié effronté. Puis rien ne se passe.
Pékin n'a jamais soutenu de lourdes sanctions contre la Corée du Nord, craignant des troubles dans ce pays imprévisible avec lequel la République populaire partage sa frontière nord-est. Et la nouvelle stratégie américaine du "pivot", consistant à se tourner vers l'Asie-Pacifique, devrait encore moins inciter la Chine à s'aligner sur la position de Washington, d'autant que Pyongyang ne se prive pas d'exploiter le haut niveau de méfiance caractérisant les relations sino-américaines.
L'instabilité à la frontière est pour Pékin une source d'inquiétude bien plus grande que le problème nucléaire.
"La Chine s'est toujours inquiétée de voir la Corée du Nord s'effondrer du jour au lendemain", relève Zhu Feng, professeur de relations internationales à l'université de Pékin. "Il pourrait y avoir un afflux de réfugiés, une guerre civile, des confrontations militaires. C'est pour cela que la Chine hésite."
Depuis la grande famine du milieu des années 1990 qui a tué plus d'un million de Nord-Coréens, la Chine fournit à Pyongyang une aide en aliments et en carburant dont on ignore l'ampleur. Et elle a récemment augmenté ses échanges et investissements.
Le commerce entre les deux pays a bondi de 24,7% sur un an, à 3,1 milliards de dollars, au premier semestre. Au cours de l'année précédente, les échanges annuels avaient déjà totalisé 5,7 milliards de dollars, soit une hausse de 62,4%.
On estime aussi que Pékin a une conception généreuse - en faveur de Pyongyang - de ce qui définit les "biens de luxe" que l'Onu interdit d'exporter vers la République démocratique populaire de Corée (RDPC).
"Pékin ne va pas mettre Pyongyang le dos au mur. Parce qu'il ne veut pas une guerre et ne veut pas modifier le statu quo dans un sens favorable aux Etats-Unis".
Les experts évoquent la possibilité pour les Américains de s'appuyer sur les lois existantes pour contraindre Pékin à une surveillance accrue des transactions financières avec la Corée du Nord.